C’est la sensation cinématographique de la rentrée de janvier. Pas besoin d’attendre la sortie de Pieces of a Woman dans les salles obscures pour découvrir ce bijou de drame conjugal signé Kornél Mundruczó, porté par l’extraordinaire duo Shia LaBeouf et Vanessa Kirby.
Un mélodrame conjugal signé Kornél Mundruczó
Netflix s’est emparé du film d’auteur phénomène produit par Martin Scorsese en rachetant ses droits juste après sa projection adoubée à la Mostra de Venise. Pour le plus grand plaisir de nos soirées sous couvre-feu en mal de sensations arty.
Loin de ces terrains d’explorations habituels, le réalisateur hongrois chéri de Cannes (Prix Un Certain Regard pour White God) change radicalement d’univers avec cette tragédie intimiste écrite avec sa femme, la dramaturge Kata Wéber.
Bienvenue sur la côte Est dans la maison bohème d’un couple hipster. Martha, jolie blonde issue de la high society de Boston, est sur le point d’avoir un bébé avec Sean, un beau barbu, maître d'œuvre dans les constructions de ponts, agacé par le pouvoir financier et mal-aimé par sa belle-mère castratrice, magistrale Ellen Burstyn (Requiem for a Dream, L’exorciste…). Pas assez riche, pas assez battant, pas assez intello pour cette juive rescapée des camps qui rêve d’excellence pour sa progéniture et écarte les intrus sans états d’âme.
La scène d’accouchement : une claque cinématographique
La première scène de 25 minutes, performance magistrale, est une claque. Martha a décidé d'accoucher à la maison. Dès ses premières contractions, Sean appelle la sage-femme pour l’arrivée de l’heureux événement. Déjà occupée, elle en envoie une autre.
Caméra à l’épaule, Kornél Mundruczó capte cet accouchement en douleur dans l’intimité du couple, avec un réalisme et une densité émotionnelle d’une telle justesse qu’il parvient à faire monter la tension sans exagération et pointer le drame.
Le bébé en insuffisance cardiaque n’y survivra pas. Le générique d’introduction défile. Il laisse un homme désemparé et une femme au cœur en morceaux dans un hiver glacial.
Vanessa Kirby, une actrice anglaise majeure
On avait découvert l’actrice British, impériale jeune Margaret, dans la série The Crown. Dans Pieces of a Woman, qui lui a valu le prix d’interprétation féminine à la Mostra de Venise, Vanessa Kirby brille dans la sobriété. Malgré un caractère impétueux et une grande gueule, pas vraiment dans le moule, le personnage de Martha se dévoile tout en subtilité, loin des clichés hystériques qui auraient pu planer autour de cette mère en deuil. La douleur sans la colère vive ni le désir de trouver un coupable à sa tragédie.
C’est aussi la fragilité d’un couple que pointe à jour la réalisation, qui malgré un amour sincère et solide, est essoré. L’épreuve fait jaillir toutes les failles de leur “team”, à commencer par l'impossibilité de partager le deuil.
Il y a la nécessité de solitude pour Martha, le besoin de communier avec l'être aimé pour Sean, bouleversant dans son désespoir, qu’on regarde s’enfoncer vers tous les mauvais chemins… Bref, c’est l'histoire du deuil d’un enfant qui n’a pas eu le temps de vivre, mais surtout celui d’une difficile renaissance.
Pieces of a Woman, sur Netflix dès le jeudi 7 janvier
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