Que penser du nouveau roman de Leïla Slimani ?

Portrait de Leïla Slimani auteur du Roman Le Pays Des Autres

Depuis son prix Goncourt en 2016 pour Chanson douce, chacun de ses nouveaux romans est un évènement. Avec Le pays des autres, Leïla Slimani s’attaque à une trilogie qui débute dans le Maroc des années 1950, tout droit inspirée de l’histoire de ses grands-parents : un couple mixte franco-marocain confronté à un violent choc des cultures.

Pourquoi ce nouveau roman est (encore) une réussite ?

Il était une fois…

Mathilde, une Alsacienne fantasque, tombe raide dingue d’Amine, un spahi (militaire haut gradé de la cavalerie marocaine) envoyé en Alsace en 1944 pendant la guerre. Bravant les craintes de sa famille, la jeune femme amoureuse se marie et quitte la France pour Meknès, la ville natal d’Amine.

Dans ce protectorat français des années 1950, alors que le désir d’indépendance gronde au Maroc, Mathilde découvre un monde bien loin de ses fantasmes exotiques. Isolée dans une ferme sombre, rejetée par les Marocains comme les colons, Mathilde, jeune maman d’Aïcha, est réduite à s’ennuyer à la maison, en s’efforçant d’intégrer les codes du pays… Sans rien perdre de son caractère de feu !

Des femmes fortes

Fidèle à son écriture, Leïla Slimani continue de dresser de magnifiques et poignants portraits de femmes sans tomber dans un récit manichéen.

Face au déni des femmes marocaines vouées à rester dans l’ombre de leurs maris et à sa perte d’appartenance culturelle, Mathilde sait malgré tout faire entendre sa voix. Amine se rend dans une soirée réservée aux hommes ? Qu’à cela ne tienne, Mathilde se fait une place à ses côtés, sous les yeux médusés des amis de son mari, quitte à se prendre une gifle en rentrant à la maison.

Il y a aussi Aïcha, leur enfant, cocktail explosif des deux mondes perpétuellement en confrontation. Aussi surdouée qu’indomptable, la petite fille, envoyée contre son gré à l’école française gérée par des bonnes sœurs, incarne à elle seule un avenir radicalement différent, à l’heure où le nationalisme et le désir d’indépendance du pays gonflent à vitesse grand V.

Un biographie familiale

Pour écrire le déracinement et l’histoire de son pays natal dans sa décolonisation, l’écrivaine née à Rabat s’est librement inspirée de l’histoire de ses grands-parents. L’auteure raconte le métissage de sa grand-mère Anne, alias Mathilde : ni tout à fait blanche ni tout à fait arabe. Mathilde est forcée, en épousant un indigène, de remettre les compteurs à zéro. Loin de l’image qu’elle se faisait du Maroc colonisé et exotique, la jeune femme est engloutie dans une vie familiale teintée de misère et d’ennui.

Comment trouver sa place et construire sa vie dans le pays de l’autre quand on est un couple mixte ? Peut-être en laissant passer le temps et les générations, comme le suggère l’écrivaine à travers l’histoire d’Aïcha. Un personnage inspiré d’Anne, la maman de Leila Slimani !

Verdict

Histoire d’amour métissée, bouleversements historiques, réflexion sur le colonialisme et la décolonisation, écriture fluide et récit addictif  : encore un combo gagnant pour l’auteure de Dans le jardin de l’ogre qui s’essaye cette fois à un nouveau genre, loin du Paris contemporain. Hourrah, les deux prochains tomes de la trilogie sont déjà annoncés pour 2022 et 2024 !

Couverture du Livre Le pays des autres de Leïla Slimani

Le pays des autres - La guerre la guerre la guerre de Leïla Slimani, Gallimard

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