Notre acteur chouchou Clovis Cornillac dans les souliers du roi de l’impressionnisme Claude Monet, c’est le combo gagnant inattendu qui enchante en ce moment la scène du Théâtre de la Madeleine. La mise en scène de Tristan Petitgirard (Molière 2019) dévoile un Monet sujet à une énorme panne d’inspiration, qui en 1892 décide de s’enfermer plusieurs mois au-dessus d'une boutique de lingerie à Rouen… pour en peindre la cathédrale.
Un peintre qu'on ne peut pas voir en peinture
Ronchon et cynique, l’artiste semble franchement mal parti pour mener à bien son projet. À peine installé, ne voulant pas sortir de son lit, il est rejoint par Camille (Maud Baecker), une jeune modèle de la boutique venue passer un corset. Imaginez une blonde romantique et optimiste tout droit sortie d’un livre de Jane Austen, qui exaspère et insupporte un Monet tout aigri. Il irait volontiers jusqu’à la payer pour avoir la paix, mais cette jeune femme libérée ne supporte pas de voir son voisin se renfermer dans sa misère. Déterminée à lui insuffler une nouvelle inspiration, elle l’oblige à peindre. Pourrait-elle illuminer la vision artistique de Monet, alors que sa cataracte commence déjà à lui obscurcir les yeux ?
Un jeu de lumière
Cette pièce est une vraie ode à la création artistique. On rencontre un Monet à une époque un peu zappée de sa vie, lui qui est plus connu pour son Giverny de rêve et ses chefs-d’œuvre quasi-inestimables. Clovis Cornillac incarne un homme successivement imbuvable, pitoyable puis attachant dans son rôle d'ours mal léché. Le personnage du peintre en pleine crise artistique évolue comme lune contre soleil face à une Camille joyeuse, pleine d’espoirs et de motivation. Maud Baecker est captivante dans son jeu : se muant en la muse de Monet, elle incarne presque la joie personnifiée. On rit avec elle et on râle avec lui.
Mention spéciale également pour la mise en scène où, dans le décor simple d’une chambre de bonne, le jeu de lumière illumine d’or et de rose la cathédrale invisible de l’autre côté de la fenêtre, illustrant le voyage du peintre entre pessimisme et inspiration, entre les ténèbres et la clarté retrouvée. Dans les yeux de Monet en devient quasiment une rom-com sur scène, poétique et enchanteresse.
Au Théâtre de la Madeleine, du mercredi au samedi à 21h, les samedis et dimanches à 15h30.