Le duo Jaoui-Bacri est de retour. Dans Place publique (co-écrit par les deux et réalisé par Agnès Jaoui, comme toujours), ils s’attardent sur le temps qui passe et la perte de la séduction, masqué par le gentil discours officiel sur la vieillesse - pour ne pas en dégoûter les autres. Avec joie et bonne humeur bien sûr, on vous rassure.
Réunis à la campagne pour une crémaillère avec tout le gratin du showbiz ringard (miss météo, jeune youtubeur qui se prend pour 50 Cent, acteurs de série à la Plus belle la vie…), ils jouent le jeu de la fête sans trop y croire. Nos trois bonnes raisons de réserver sa place.
Parce que c’est bon de les retrouver
Les deux compères les plus complémentaires du cinéma (et du théâtre bien sûr) nous avaient manqué depuis Au bout du conte en 2013. Dans Place publique, les deux campent deux exs maris et femme, totalement dépassés par les événements quand leur fille sort un bouquin à charge contre chacun des deux (la moumoute de l’un, le militantisme exacerbé de l’autre…).
Et comment se lasser devant des dialogues aussi aiguisés et ce sens de l’observation toujours plus délicieux. Mention spéciale pour les deux séquences où Bacri se lance dans des imitations en chanson d’Yves Montand et Alain Bashung. On en redemande.
Pour la réflexion sur la vieillesse
Castro (Bacri) est un présentateur télé hasbeen, dont plus personne ne veut. Cynique devant l’éternel, il se raccroche pourtant à sa jeunesse entre deux rails de coke et se montre de plus en plus jaloux (et odieux) avec sa compagne de presque 20 ans sa cadette (Helena Noguerra, solaire).
Plus optimiste, Hélène (Jaoui) est toujours portée par ses idéaux de jeunesse gauchiste et passe sa soirée à faire signer une pétition pour sauver une réfugiée afghane. Quand on croit que l’amour est là, il est balayé manu militari par une petite jeune qu’on n’attendait pas. PAs de bol. Sans verser dans le politiquement correct, Agnès Jaoui dédramatise la vieillesse et livre un feel-good movie décomplexant.
Pour la panoplie de seconds rôles
C’est le talent inné de la réalisatrice : tricoter des seconds rôles sur-mesure, du genre qu’on n’oublie pas. C’est le cas de la sœur productrice qui ne lâche jamais son iPhone à pompon, l’écouteur vissé dans une oreille (Léa Drucker), le chauffeur un brin taciturne qui observe tout depuis sa chaise dans l’entrée (Kevin Azaïs, qu’on avait déjà adoré dans Le sens de la fête), ou encore la serveuse un rien empotée, hallucinée de croiser tant de people concentrés dans son petit bled, et qui se fait rappeler à l’ordre toute la sainte soirée (hilarante Sarah Suco). Sans oublier le mari bulgare romantique avec son accent à couper au couteau, que seule sa femme comprend et qui pourtant se lance dans un long discours inaudible. Pépite.
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