A 30 ans, Nina Meurisse fait beaucoup parler d’elle. Il faut dire que cette actrice belle comme le jour a un parcours étonnant. Propulsée à 10 ans tête en d’affiche d’un film à grand succès… Avant de faire ses armes dans le cinéma. Son credo ? Bosser à l’américaine, étudiant tour à tour la harpe, le chant et le piano, la danse classique puis le théâtre. De toute évidence, la persévérance paye ! Après l’avoir repérée sur le tournage du film Au bout du conte, Agnès Jaoui a rappelé Nina pour la diriger dès février dans sa pièce phare un “Air de famille”… C’est sans compter son rôle épatant dans "Une vie", le film de Stéphane Brizé, une merveille sortie mercredi en salle, adapté du roman du même nom de Guy de Maupassant. Rencontre avec la future actrice bankable du cinéma français...
Comment êtes-vous devenue actrice?
Vraiment par hasard. L’année de mes 10 ans, l’équipe du film Saint-Cyr cherchait des figurants pour leur film et a organisé un immense casting en Normandie où toutes les petites filles ont participé en rêvant du premier rôle… Sauf moi. Je ne voulais pas participer mais des copains de mes parents ont insisté et m’ont inscrite sans me demander mon avis. Bref, d’essais en essais, j'ai décroché le rôle principal avec Isabelle Hupert. Après cette expérience, mes parents voulaient vraiment que je retourne sur le chemin normal de l’école, plutôt que de faire de moi une petite actrice. L’agence VMA a insisté… Et j’ai fini par accepter. C’est un peu comme si le métier m’avait choisie. Après le bac, j’ai rejoint le conservatoire du 14e arrondissement, puis des cours à "l’école du Printemps" à l’académie des arts de Minsk pendant 6 mois. C’est rigolo, j’ai fait le chemin mais à l’envers… En commençant le cinéma de façon très instinctive avant de travailler des textes super classiques mais sublimes de Racine ou Tchekhov.
La vie d’actrice, c’est aussi le bal des déceptions, les échecs…
La vie d’actrice, c’est une course de fond. J’aime l’idée de l’école américaine qui prône le travail, ce qui a un côté très rassurant, où l’on peut cumuler, la danse, la comédie, le chant, la télé, à condition de bien le faire. C’est du boulot, évidemment, mais plus tu bosses, plus tu as de chances de réussir. Du coup, on prend plus rapidement confiance en soi que dans l’école française qui juge les actrices selon leur âge, leur physique ou leur côté “bankable”. Chez nous, on a cette tendance un peu agaçante à chercher une fille dixit qui “a un truc en plus” , “une beauté”... Globalement, je trouve cela ridicule. Je suis intimement convaincue que seul le travail paye. J’espère en tout cas…
Il y a aussi des sublimes surprises… Comme le tournage d’Une vie, le film de Stéphane Brizé qui vient de sortir. Une aventure incroyable. A la base, ils avaient choisi une autre actrice, mais ils m’ont appelée la veille du tournage, alors que les premières prises du film avaient déjà commencée. C’était un dimanche, pendant un barbec’. Je ne connaissais pas le scénario... Le tournage m’a permis de lâcher prise. J’ai totalement improvisé et j’ai adoré.
A quoi ressemble la journée type d’une actrice ?
ça change tout le temps ! Au moment où je vous parle, je suis sur le tournage de 10 jours au Maroc, pour MAD, un court-métrage sur une journaliste qui part en tant que reporter en Syrie… C’est un tournage de nuit. Donc : le matin, je prend mon petit dej face à la mer avec des jus sublimes et des pains à l’huile d’olive délicieux. Le paradis ! Ensuite je relis les textes et les scènes. Et après go !
Lundi, je commence les répétitions d’un “Air de famille” et de “Cuisines et dépendances” sous la direction d’Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri sur le grand plateau du Théâtre de la Porte de Saint-Martin. Il va falloir m’enfiler 200 pages de texte par cœur et ça m’angoisse complètement. J’ai une amie qui me fait répéter le texte depuis le mois de mars dernier ! Je veux vraiment être à l’aise avec le texte pour pouvoir m’amuser et m'éclater avec la troupe. C’est la moindre des choses… Surtout face à des acteurs aussi incroyables que Katherine Heigl ou Léa Drucker !
Comment se prépare un casting ?
Je trouve qu’un réalisateur peut avoir du mal à se projeter dans un personnage de composition. Du coup, j’y vais à fond pour coller au personnage: j’essaye de trouver les même fringues, la même coiffure que ce qui est décrit dans la scène à jouer, coller au maximum à l’humeur de la scène… Les 30 premières secondes suffisent à un directeur de casting et le réalisateur se font un avis.. Il faut être à fond dans le personnage pour voir si ça colle avec ce que le réalisateur a fantasmé.
Comment gérez vous le trac ?
Très mal ! Jusqu'à ce qu’Agnès Jaoui me montre les affiches officielles du spectacle, je pensais secrètement qu’en fait, j’allais être remplacée. Souvent, avant de monter sur scène, j’ai envie de vomir, ça ne va pas du tout. Le trac m’enlève le plaisir de jouer, au départ. C’est terrible. Alors qu’au cinéma pas du tout…
Même sur les tapis rouges ?
J’ai peur avant, peut-être de ce que je ne pourrais pas maîtriser de ce qu’on capte de moi. Mais une fois sur le red carpet, je suis ravie ! Avoir une belle robe et présenter un beau film, c’est cool, non ? Le plaisir de ce métier c’est d'avoir plusieurs personnages… et d’avoir la chance de pouvoir assumer un vrai côté glam’, une immense féminité qu’on n’a pas le temps d’explorer au quotidien.
Un créateur qui vous fait fantasmer pour un red carpet ?
Elie Saab. Ou Saint Laurent… En robe, évidemment.
Votre secret beauté?
Une bonne playlist. La musique ça donne la pêche et la bonne humeur ! En ce moment : quand je suis vraiment crevée, je me dis, allez : soyons féminine. Ne plongeons pas dans la dépression "Häagen Dazs" et je me fais poser le masque rose noire de chez Sisley. Il est incroyable.
Un film à voir ?
"Une vie" de Stéphane Brizé, évidemment, adapté du roman de Maupassant.
Le jeu d’actrice de Judith Chamlat est renversant ! On n’a jamais capté cette époque de façon aussi moderne et contemporaine. Stéphane Brizé (également réalisateur de la Loi du Marché avec Vincent Lindon) est époustouflant.
Vos bonnes adresses quand vous rentrez d’un tournage?
Je me balade autour de La Goutte d’or, le quartier où j’habite, j’adore son petit côté Paris berlinois. Je m’installe au Café Lomi qui fait le meilleur café de Paris. (3 ter rue Marcadet, 75018 Paris). Je vais aussi au Grand Train, trop sympa.
J’adore aussi aller au Centquatre-Paris, où il y a toujours des soirées, des expos, des concerts, du cirque. Ce lieu mélange des genres, des arts. C’est le Paris d’aujourd’hui et du mélange et de la mixité. (5 rue Curial, 75019 Paris). J’adore aller à Drouot aussi.
Un café où croiser le beau monde du cinéma ?
Les réalisateurs donnent très souvent rendez-vous à L’Hôtel Amour (8 Rue de Navarin, 75009 Paris). Vous y croisez toujours des acteurs, des agents...
Votre astuce pour garder la ligne ?
Je fais du yoga ashtanga à yoga 91, avec une prof canon qui allie la rigueur et la douceur.
Je fais également de la boxe à Bercy dans une salle municipale avec des flics et des pompiers. J’ai commencé à m'entraîner là-bas pour préparer la série Glacé avec Charles Berling qui sort en janvier sur M6. Ce n’est pas glam mais c’est physique. On se défoule et ça me fait tellement de bien que j’ai continué après le tournage. Mais je dois garder le lieu secret… Ça donne envie, hein ?
Une série à nous conseiller?
Black Mirror sur Netflix… C’est une bombe atomique à la limite du fantastique. Chaque épisode est un film en soi, avec des personnages et des intrigues différents, qui explorent à chaque fois à un nouveau genre : la comédie romantique, le thriller, un scandale politique... Je trouve ça tellement inventif et loin de la série qu’on attend. Une tuerie.