Personne ne sait qui elle est. Et la romancière italienne de la tétralogie best-seller L’Amie prodigieuse a vu juste : on ne parle que de cette anonyme et du mystère qui l’entoure. Dans Frantumaglia, un recueil inédit de lettres et d’entretiens, Elena Ferrante ajoute à sa légende (ou nous mène encore une fois en bateau) en donnant quelques indices sur sa personnalité. 5 choses à savoir sur cet écrivain de génie.
Une femme sans visage... de 76 ans
Dès ses premières publications dans les années 90, la romancière, timide, affirmait qu’elle ne ferait jamais d’apparition publique. Elle promet ainsi à son éditrice de ne céder à aucune forme de promotion en 1991 : « Je serai l’auteure la moins chère de la maison d’édition. Ma présence même vous sera épargnée. » Depuis, personne n’a eu la chance de voir ne serait-ce que le bout de son nez. Mais dans Frantumaglia, pour la première fois, la romancière affirme qu’elle serait née à Naples en en 1943 d’une mère couturière s’exprimant en napolitain. Elena Ferrante aurait donc de nombreux points communs avec Elena et Lila, les personnages de sa tétralogie L’amie prodigieuse, qui grandissent dans les faubourgs pauvres de Naples...
Une grande lectrice
Avant d’être une grande auteure, Elena Ferrante est surtout une grande lectrice. Pour préparer son discours du prix Elsa Morante qu’elle reçoit en 1992 (quelqu’un le lira à sa place), Elena Ferrante a puisé dans ses souvenirs de lectures et affirme que Tolstoï, Dostoïevski, Flaubert, Victor Hugo ont été ses modèles durant toute sa jeunesse, contrairement à Madame de Lafayette ou les sœurs Brontë dont elle n’aimait pas l’écriture.
Une féministe dans l’âme
Préférant les écrivains aux écrivaines, c’est seulement à trente ans qu’Elena Ferrante se penche sur les grandes figures féminines (et le plus souvent féministes) de la littérature comme Jane Austen ou Virginia Woolf qui façonneront son écriture. Elle prend alors conscience de l’importance des combats féministes de l’époque et affirme aujourd’hui : « Je ne saurais me reconnaître sans les luttes des femmes et la littérature des femmes (...) : c’est grâce à elles que je suis devenue adulte. » Mieux, elle pousse toutes les femmes à ne jamais renoncer à « une liberté extrême » : selon elle, une romancière (et c’est valable dans tous les domaines) ne doit pas avoir l’ambition d’être la meilleure parmi les écrivaines, mais d’être la meilleure tout court, tout sexe confondu.
Une férue de presse féminine
Plutôt que de s’en cacher, Elena Ferrante en est fière : au-delà de la belle littérature à laquelle elle rend hommage tout au long de son ouvrage, l’auteure humble et déterminée chante les louanges de la presse féminine et de ses anecdotes légères qui l’ont inspirée pour ses propres romans : « Plus les années passent, moins j’ai honte de m’être passionnée pour les histoires des journaux féminins qui circulaient autrefois chez moi (...) Ce sous-sol de l’écriture (...) me semble lui aussi devoir être exploité, car ce n’est pas seulement parmi les classiques, mais là aussi que mon envie de raconter a grandi. »
Un anonymat nécessaire à son écriture
La romancière révèle qu’à ses débuts, elle aurait préféré de pas être publiée plutôt que de montrer son visage. Ce choix de l’anonymat déjà expérimenté par les écrivains Julien Gracq ou Thomas Pynchon, conditionne, pour Elena Ferrante, une liberté créative absolue : « J’ai eu l’impression d’avoir libéré les mots de ma personne. » C’est aussi cette identité cachée censée la protéger qui lui permet, paradoxalement, de gagner en présence dans ses textes : « L’écrivain qui n’existe pas à l’extérieur du texte s’offre à l’intérieur du texte, s’ajoute consciemment à l’histoire, œuvrant de façon à être plus vrai qu’il ne parviendrait à l’être sur les photos d’un magazine. »
Frantumaglia, Elena Ferrante, Gallimard
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