Que penser du nouveau Houellebecq ?

Serotonine roman

credit : Photo Philippe Matsas © Flammarion

À peine sorti en librairie, il fait déjà l’objet de polémiques à gogo dans tout Paris : qualifié de misogyne, dérangeant, malaisant… Avec Sérotonine, Michel Houellebecq, quatre ans après la parution de Soumission, secoue encore une fois ses lecteurs. Sur le papier, le pitch est pourtant classique : un homme, récemment séparé de sa compagne, sombre dans une sévère dépression. Que penser de ce nouveau roman choc ?

Un cynisme inégalable

Signature de notre Houellebecq national (on ne change pas une équipe qui gagne !), Sérotonine se construit dans un cynisme particulièrement plombant. Florent-Claude Labrouste est un ingénieur agronome de 46 ans employé au ministère de l’agriculture. Déprimé après avoir quitté sa compagne japonaise de 26 ans, Florent-Claude erre dans un hôtel Mercure glauque à Paris puis en Basse-Normandie.

Il doit sa survie au Captorix, un médicament qui stimule la production de sérotonine, l’hormone de l’estime de soi. Avec le ton ironique et mordant qui lui est propre, Houellebecq s’attelle, via ce personnage dégoûté de tout, à disséquer le déclin du sentiment amoureux, la France, l’Union Européenne… Bref, l’Occident tout entier.

Un Houellebecq borderline (comme toujours)

Volontiers provocant, Houellebecq reste fidèle à ses punchlines dans son nouveau roman. Au programme : pornographie zoophile, sexisme primaire, moqueries immorales… Comme toujours, bon nombre de modes (la dictature des valises à roulettes), de personnalités (Kev Adams ou Christine Angot), ou de villes (Niort étant qualifiée par le personnage de "La ville la plus laide qui m’ait été donnée à voir") en prennent pour leur grade. Si tous ces sujets plus que borderline ponctuent l’intégralité du livre, ils sont presque tous amenés avec un ton pince-sans-rire souvent hilarant.

Des envolées misogynes à souhait

Féministes, passez votre chemin ! Florent-Claude, le protagoniste, a une vision bien à lui des femmes, souvent qualifiées de "grosses salopes". Ses ex sont pour la plupart réduites à leurs "petits culs" ou à leurs "trois trous". Bien que les propos sortent de la bouche d’un personnage fictif et non pas de celle de l’auteur, on retrouve la vision récurrente et passablement péjorative de l'écrivain sur les femmes, à l’instar de “la carte et le territoire”.

Verdict

Créer une vraie polémique culturelle, c’est aborder les questions existentielles contemporaines. Bien que souvent (très) bordeline, Michel Houellebecq a tout compris : la littérature - et donc la fiction - s’avère la meilleure des tribunes pour exprimer certaines de ses idées sans (trop) se faire taper sur les doigts. Il choque. Mais il fait réfléchir...

Avec ses habituelles fulgurances sur l’air du temps, l’écrivain continue de représenter le réel comme personne. En tout cas mieux que Yann Moix… A recommander donc, sauf en cas de petite déprime passagère.

Roman de Michel Houellebecq edition Flammarion

Sérotonine Michel Houellebecq, Flammarion, 22 €

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