Le récit de la tondue de Chartres, l’histoire de vie de Panayotis Pascot, le dernier prix Goncourt, le récit de l’enfance du plus grand peintre du XXe siècle… Avec des centaines de livres sortis cette année, dur dur de choisir lesquels glisser sous le sapin. La Do It Team a fait le tri pour ne vous proposer que les vrais coups de cœur de l’année. La sélection des meilleurs romans à offrir, c’est par ici que ça se passe.
L’enfance meurtrie de Francis Bacon
Le bon bouquin : La nourrice de Francis Bacon de Maylis Besserie
Pour qui ? L’oncle passionné de beaux-arts, en quête d’histoires intimes à propos de personnalités artistiques ultra-désirables.
Le pitch. Qui était vraiment Jessie Lightfoot, la jeune femme qui veilla sur l’enfance de Francis Bacon ? Elle fut, jusqu’à sa mort en 1951, un pilier émotionnel vital pour le célèbre artiste irlandais et un partenaire loyal dans les bêtises en tous genres. A t-elle influencé, d’une manière ou d’une autre, l’art de celui qui deviendra l’un des peintres les plus importants du siècle dernier ? Elle apporta tout du moins une couleur inédite à la palette sulfureuse du peintre, faite de brutalité, de tragédie et de cruauté, écho certain aux violences subies dans son enfance, adoucie par la tendresse de son acolyte.
De Dublin à Londres, en passant par les Cornouailles où cette fantastique Nanny a grandi et l’Irlande de la première moitié du XXe siècle, Maylis Besserie fait voyager son lecteur à travers les multiples inspirations du peintre. Au fil des pages, l’auteure, à qui l’on doit Le Tiers Temps (Prix Goncourt du premier roman 2020), dépeint la fresque de ce monde interlope dirigé par les artistes qui le nourrissent de leurs créations : Diego Vélasquez, Vincent van Gogh ou encore Pablo Picasso. Un roman remarquable !
Un monologue intérieur percutant
Le bon bouquin : Melancholia I de Jon Fosse
Pour qui ? Le cousin qui a voyagé en Norvège récemment et a développé une passion pour les grands noms de la peinture nordique.
Le pitch. Comment un artiste peut-il traduire la douleur, la peur ou encore la joie au travers d’un coup de pinceau ? Comment les étapes d’une vie peuvent-elles se laisser deviner par le choix des couleurs ou de la lumière ? Le héros de ce roman n’est autre que Lars Hertervig (1830-1902), un peintre nordique de renommée mondiale. Études à Düsseldorf, séjour en asile psychiatrique, troubles nerveux… À travers deux monologues intérieurs, pétri d'obsessions et de répétitions, le peintre se met à nu et dévoile toute sa mélancolie.
Jon Fosse, qui signe ici son premier roman traduit en français, s’invite dans la tête du peintre, dévoile jusqu’à ses pensées les plus sombres et donne ainsi à voir le martyre de cet artiste. Le tout crée un récit fascinant, profondément intime et percutant. La folie du peintre norvégien est appréhendée par le génie de l’auteur au plus près, au point d'être palpable et vraiment angoissante… Melancholia I est un livre dont on ne sort pas totalement indemne et c’est certainement la raison pour laquelle il a raflé le Prix Nobel de littérature.
Panayotis Pascot se met à nu d’une plume tranchante
Le bon bouquin : La prochaine fois que tu mordras la poussière de Panayotis Pascot
Pour qui ? Les frangins en quête d’un bon récit autobiographique, de ceux qui portent un regard acerbe sur notre société actuelle.
Le pitch. Il s’avère que derrière le masque de clown (quelque peu mélancolique), notamment lors de ses chroniques pour Le Petit Journal et Quotidien, se cache un très bon écrivain. Panayotis Pascot signe ici son premier roman, un récit autobiographique poignant dans lequel il se raconte, et se fait le miroir de toute une génération. Lorsqu’il apprend que son père va mourir, l’auteur se plonge corps et âme dans ce texte, réglant ses comptes avec lui pour mieux le laisser partir.
Qu’est ce qu’être un homme ? En plein passage à l’âge adulte, il livre un combat intérieur contre la virilité toxique et la place de l’homme dans une société hétéronormée. Panayotis Pascot revient sur ses liens oedipiens avec son père, mais aussi son rapport parfois compliqué avec la sexualité et le désir. Il parle de deux de ses amants, qu’il surnomme avec tendresse La vie et Le bonheur. D’une plume terriblement moderne, il raconte la grave dépression, les pensées suicidaires et surtout la lente et douloureuse acceptation de son homosexualité. Un récit tranchant et pourtant teinté d’humour.
Le récit poignant de la Tondue de Chartres
Le bon bouquin : Vous ne connaissez rien de moi de Julie Héraclès
Pour qui ? Le grand-père féru d’histoire et passionné de vieilles photographies.
Le pitch. Au départ, il n’y avait que cette photographie prise par Robert Capa le 16 août 1944. Noir sur blanc, on peut voir une femme tondue, tenant un nourisson entre ses bras, traversant les rues de Chartres. Sur fond d’épuration sauvage menée après la Libération, ce livre raconte l’histoire de Simone Touseau, dites la Tondue de Chartres, cette femme libre et passionnée qui marche la tête haute. Ce récit est celui de Simone, de ses proches, de son enfance puis de son poste de traductrice pour les Allemands. Elle tombe éperdument amoureuse d'Otto, soldat du troisième Reich, amour qui donnera naissance à Françoise.
« Dans trois jours, j'aurai 23 ans. Je vais mourir avant. Ils ne me louperont pas. » Traitée de collabo, Simone sera tondue, marquée sur le front au fer rouge, comme beaucoup d'autres, et exhibée sur la place publique. À travers un roman richement documenté et en s’inspirant librement de cette photographie, Julie Heracles, qui signe son premier roman, raconte la vie de cette femme. L’auteure livre un récit bouleversant et poignant, plongeant son lecteur dans la période de l'après seconde guerre, entre dénonciations et collaborations.
Le prix Goncourt pour une grande histoire d’amour
Le bon bouquin : Veiller sur elle de Jean Baptiste Andrea
Pour qui ? La grande tante intello qui met un point d’honneur à lire chaque prix Goncourt depuis 1957.
Le pitch. Mimo vit les derniers instants d’une vie tumultueuse, cloitré auprès des frères qui l’ont accueilli des années auparavant. En attendant la fin, il veille sur sa dernière œuvre, une mystérieuse pietà, soustrait aux regards extérieurs par le Vatican, tant ses effets sur ceux qui la voient sont puissants. Qui est cet homme et quelle est cette histoire d’amour qui semble l’avoir marqué au fer blanc ? Cette histoire est celle de ce sculpteur de génie, né pauvre et confié en apprentissage à un tailleur de pierre sans envergure. Lorsque Mimo s’éprend d'une aristocrate au caractère aventureux, Viola Orsini, il est bien loin de se douter que cet être singulier en avance sur son temps va bouleverser toute sa vie.
Jean Baptiste Andrea, qui signe ici son quatrième roman, imagine une histoire d’amour poignante avec, en toile de fond, l’Italie de l'entre-deux-guerres, entre montée du fascisme et arrivée au pouvoir de Mussolini. L’auteur, d’une écriture juste et limpide, dresse également la fresque d’une Italie qui a vu naître tant d'artistes de génie. Le must ? La grande beauté du roman réside dans la création artistique même du sculpteur, les descriptions sont si brillamment ficelées qu’elles se lisent comme une quête du graal. Brillant !
Le roman sur la dure réalité de la transition écologique
Le bon bouquin : Humus de Gaspard Koenig
Pour qui ? N’importe quel parent écolo qui, comme toute une génération, est terriblement angoissé par la crise écologique.
Le pitch. Humus raconte l'odyssée de deux jeunes étudiants en agronomie, critiques de l’agriculture intensive. Leur objectif ? Changer le monde, ou tout du moins essayer. Kevin, fils d'ouvriers agricoles et Arthur, enfant de la bourgeoisie, se lient d'amitié après avoir assisté à une conférence intitulée Avancées et défis de la géodrilologie (la science des vers de terre). L’un souhaite lancer une start-up de vermicompostage et revêt l'uniforme du parfait transfuge sur la scène du capitalisme vert, l’autre veut tenter de régénérer le champ familial ruiné par les pesticides.
Il se crée rapidement entre ces deux explorateurs des temps modernes une complicité sans faille. S’ils se jurent de ne jamais abandonner les vers de terre et de leur consacrer leur carrière et leur vie, ils se heurtent rapidement à la dure réalité de la vie rurale. En décrivant un chemin parsemé d'embûches, Gaspard Koenig, qui s’était fait remarquer avec Octave avait 20 ans, explore les vices et les vertus d'une génération qui veut changer le monde et reçoit, pour ce faire, le prix Interallié. En somme, le récit percutant de réalisme de deux idéalistes.
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