Après son bac, cette Aixoise pleine de peps arrête ses études après un BAC S et lance instinctivement sa bonne idée. La preuve qu’une tête bien faite et qu’un modèle viable valent tous les diplômes du monde. La recette de son succès ? Des petits sablés au beurre estampillés de messages rigolos. 5 ans plus tard, celle qui a commencé toute seule dans sa cuisine fait office de référence dans l’entrepreneuriat avec 820 m2 de productions de biscuits à Aix et une boite de 10 personnes en pleine croissance.
Comment est née l’idée des biscuits à message ?
Par hasard, à un anniversaire. On m’a offert un tampon à biscuit avec écrit “Approuvé par le chef”. Je fais les biscuits et je me dis “C’est cool d’avoir un message sur un biscuit”... J’aurais aimé les offrir, mais avec un autre message. Sur le coup, je n’ai pas du tout réfléchi à monter un business, j’ai juste pensé : "Il faut que ça existe" ! J'ai trouvé un kit sur Internet avec un emporte-pièce et des lettres pour faire des biscuits sur-mesure chez moi. Je les vendais sur un site, et ça m’a permis de démarrer sans argent, pour le fun. Ce qui m’a plu, c’est d’imaginer un concept, créer un logo…
Vous vous êtes lancée sans faire d’études ?
Oui. Après un bac S, je suis partie aux USA pour faire du cheval et apprendre l’anglais, en joignant l’utile à l’agréable. Quand je suis rentrée, les facs étaient bloquées… Je me suis trouvé un boulot dans l’aéronautique. Ça m’a permis de voir comment fonctionnait une production, entre gestion de stock, production et livraison, ce que j’ai pu par la suite reproduire pour mon entreprise. Ils m‘ont signé un CDI direct, du coup je suis restée et c’est quand j’etais là-bas que j'ai eu l'idée de Shanty Biscuits.
Quel a été le déclic pour vous consacrer à plein temps à Shanty ?
À vrai dire, je n’ai pas eu le choix. J’avais réussi à négocier un mi-temps dans mon job dans l’aéronautique pour lancer Shanty en parallèle. Mais neuf mois plus tard, ma boss avait besoin de quelqu’un full-time. C’était soit ça, soit une rupture conventionnelle. Je commençais à avoir de vraies commandes avec Shanty Biscuits. J'ai accepté la rupture. Sinon, je ne sais pas comment j’aurais eu le déclic.
Ça a pris tout de suite ?
J’ai quitté mon job au moment des commandes de Noël, qui est toujours le plus gros mois de l’année. Au mois de janvier, je n’ai pas eu une seule commande. L’angoisse ! Et puis, c’est reparti. Au début, c’était hyper dur. J’ai tout fait de chez moi pendant 2 ans : la pâte, les biscuits, l'emballage, le site, les photos... À la fin, ça me prenait tout mon temps. Je n’avais plus de vie. Je me suis dis qu’il fallait que je passe à l'étape supérieure.
À partir de quel moment cela a-t-il été rentable ?
J’ai toujours été rentable. Psychologiquement, ça m’aurait trop angoissée de ne pas l’être. Le modèle, c’est de vendre à la commande, en direct, sans intermédiaire… Il n’y a pas de stock. Au début, j’avais un boulot à côté, donc je n’en vivais pas complètement, mais c’était rentable.
Comment avez-vous professionnalisé Shanty ?
J’ai fais rentrer des associés qui m’ont aidée, (ils sont sortis depuis) à trouver les financements, aller voir les machines, les tester. Ce n'était pas évident. Au départ, les vendeurs de machines de biscuiterie me disaient qu’il était impossible de produire de petites séries personnalisables… Du coup, on a décidé d’acheter des machines standards et de tamponner les messages avant cuisson à la main… Même quand on achetait les machines, c'était hyper dur de ce décider à cause de l'énorme panel de machines. On n’y connaissait rien ! Aujourd’hui, on peut aller jusqu'à 15 mille biscuits par jour, et je ne m’occupe plus du tout de la partie production. Ils sont cinq à la gérer autour d’un biscuit décliné en 12 parfums, également un double biscuit avec du chocolat au milieu (les meilleurs !).
Quelle est la recette du succès de vos biscuits à message ?
Je l’ai découverte seulement l'année dernière, alors que ça fait 5 ans que je suis dedans ! Le fait que les gens offrent les biscuits et les postent, ça se propage ! Chaque nouvelle commande permet de faire connaître la marque à une nouvelle personne. Quand nos clients sont des marques ou des hôtels, je n’en parle pas : ça fait encore plus de visibilité !
Le biscuit, c’est une arme de communication massive ?
Exactement. Ce qu’on vend, ce n’est pas le biscuit en soi ! On vend de la communication, de la visibilité sur Instagram. Parfois, on me dit “Oh, c’est cher pour un biscuit !”. Mais si tu le penses en budget marketing, ça génère un effet de notoriété et d’émotion pour seulement quelques centimes…
Instagram, c’est un vecteur de croissance ?
90 % de nos commandes viennent d’Insta… Notre compte a vraiment décollé depuis l'été dernier parce qu’on a joué à fond sur l'humour, l'authenticité, la spontanéité. Je n’étais pas sûre du côté business, mais à un moment donné, je préfère poster ce que j’aimerais voir. J’ai trouvé des messages qui me faisaient rire… Ça a fonctionné ! Instagram nous a réellement fait exploser. Nos commandes sont 100 % organiques.
Votre prochain gros projet ?
Le B to B avec notre futur “mini biscuit”, deux fois plus petit, pour les bistrots exclusivement, à servir avec le thé ou le café… Ce sera de l’image ! On le déclinera aussi en version salée (épices, herbes…) à l’apéro, pour remplacer les cacahuètes avec des messages dessus.
La commande la plus étonnante qu’on vous ait faite ?
“Je te quitte”. Une vraie commande. La fille nous a raconté toute l’ histoire. Les gens nous racontent souvent leur vie. C’est très rigolo. On a beaucoup de “Veux-tu m’épouser”, d’annonces de grossesses et de private jokes qu’on ne comprend même pas. À la Saint-Valentin, il y a des mecs qui envoient direct des messages à la fille sur les biscuits du style “Veux-tu sortir avec moi ?”.
Le biscuit qui a le plus buzzé ?
“Je te quitte connard” ! Il est devenu emblématique. J’essaie de trouver des messages qui parlent de situations du quotidien, auxquels on n'associerait pas vraiment un biscuit. Il y en a plein qui sont tirés de ma vie réelle, mais je ne peux même pas les dire, c’est un peu la honte...
Quelle est la commande qui vous a rendue fière ?
Plein ! Récemment pendant la Fashion Week, Chloé nous a commandé des biscuits avec leur logo… J’étais trop contente ! Mais mon rêve, c’est que les biscuits soient à l’Elysée pour le petit déj'.
Le pire souvenir de cette aventure ?
J’en ai plein… Mais surtout : les machines qui tombent en panne. Surtout celle qui emballe. J’avais acheté la moins chère possible : grosse erreur !
L’été dernier, on a eu une grosse commande en urgence pour le Printemps dans la journée. La machine à emballer est tombée en panne. On a tout fait à la main. L’équipe était à fond car on ne pouvait pas planter le client. J’étais tellement stressée qu’il m’ont virée : “Va dans ton bureau, tu nous stresses”. Au final, le soir, on a réussi à réparer la machine alors que les 5000 biscuits étaient déjà prêts.
Comment imaginez-vous la suite ?
Ça, c’est la question que tout le monde me pose. Les investisseurs me demandent si je préfère vendre ou faire une grosse boîte à vie. Je ne sais pas. Tant que je m’amuse, je continue. Moi, ce qui m’éclate, c’est de pousser l’histoire le plus loin possible en m’amusant. Si je m’ennuie ou si quelqu’un me propose de la racheter pour un prix que je ne peux pas refuser, je me dis que je ne me fixe pas d'objectifs.
Le dream biscuit de Shanty que vous aimeriez bien lancer ?
Une pièce montée en doubles biscuits avec du chocolat ou du beurre de cacahuètes.
Les autres objets personnalisables que vous adorez ?
Les culottes Henriette H, je les suis sur Insta. Et de manière générale, tout ce qui est personnalisable. Là par exemple, on lance une collab avec Monsieur T-shirt, avec des textes que j’avais mis sur les biscuits. Ce qui me plaît avec Shanty Biscuits, c’est plutôt la partie message que la partie biscuit.
Quel est votre gâteau préféré ?
Le pumpkin-pie à l'américaine ! J’adorerais d’ailleurs faire une collab avec un grand chef pâtissier…
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