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C’est une véritable pépite tropicale que signe le réalisateur brésilien Karim Aïnouz. Déjà récompensé dans la catégorie Un certain regard à Cannes, La vie invisible d’Eurídice Gusmão, inspiré du roman éponyme de Martha Batalha, pointe du doigt une société patriarcale dans le Rio des années 50 à travers une critique sociale hyper crue. Décryptage.
Rio de Janeiro, 1950
Le pitch ? Eurídice (Carol Duarte) et Guida (Julia Stockler), deux sœurs ultra fusionnelles de 18 et 20 ans, vivent ensemble chez leurs parents. Dévouée à son amour pour le piano, Eurídice rêve d’une grande carrière de pianiste alors que Guida, plus frivole, s’imagine déjà fonder une famille avec Yorgos, un jeune grec dont elle est tombée follement amoureuse.
À l’époque, les interdits sont nombreux et les relations avant le mariage sont mal vues. Résultat : Guida, animée par son désir de liberté, alors qu’elle devait simplement faire le mur le temps d’une soirée, se retrouve sur le départ direction la Grèce. Une fugue prolongée blâmée par son père, qui va semer la panique chez Eurídice et devenir la quête d’une vie, dans l’espoir de se retrouver un jour...
Un film féministe
Mais la pertinence du film réside avant tout dans son engagement intimement féministe. Avec un scénario poignant, des comédiennes pétillantes façon Almodovar, hyper spontanées, et une réalisation colorée et très juste, le mélodrame a tout bon.
Le réalisateur n’hésite d’ailleurs pas à traiter des sujets violents et à filmer l’intimité des femmes de l’époque, entre une scène d’accouchement sans filtre, la difficulté d’être fille-mère et un premier rapport sexuel qui s’apparente plus à un viol qu’une nuit de noce… Tristement vrai.
Si Karim Aïnouz a ce regard si avisé, c’est parce qu’il connaît bien le sujet. "Dans une culture misogyne, j’avais la grande chance de faire partie d’une famille où les femmes tenaient le premier rôle et dirigeaient tout".
Rendre visible l’invisible
La vie invisible d’Eurídice Gusmão célèbre la femme et son incroyable résilience, permettant un bel écho au premier film du réalisateur, Madame Sãta.
On ne peut que conseiller de mater ce drama contemporain qui questionne brillamment le matriarcat : un sujet polémique dans un Brésil qui, avec Bolsonaro, fait encore débat aujourd’hui.
En salle le 11 décembre
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