Hillary Clinton mêlée à un trafic d’enfants via le #Pizzagate. L’autisme transmis par les vaccins. Le coronavirus créé volontairement par des scientifiques, et même véhiculé par la 5G. Vous y avez cru, même une demi-seconde ? C’est normal. Avec le flux d’informations reçues à la seconde, le cerveau commence à lutter pour faire le tri.
C’est le thème plus utile que jamais de l’exposition Fake News : Art, Fiction, Mensonge, qui se tient en ce moment à la Fondation Groupe EDF. Son but ? Nous inviter à prendre un recul raisonné sur l’information. Et ce n’est pas du luxe !
Une expo fun mais instructive
Artistes, universitaires, sociologues et spécialistes des sciences de l’information ont été appelés pour livrer leur approche pédagogique, sous la curation entre autres de Laurent Bigot, directeur de l’école de journalisme de Tours et conçue avec le CLEMI, très sérieux centre pour l’éducation aux médias et à l’information.
Mais rien de rasoir à l’horizon, bien au contraire : les œuvres et témoignages vidéos s’avèrent ludiques et souvent immersifs, comme ou encore la salle de karaoké de Filipe Vilas-Boas qui revisite le tube de Serge Gainsbourg en version Le poinçonneur de l’IA, la une canular du New York Times par les Yes Men en 2008, distribuée à un million d’exemplaires, l’imprimante à fake truths de Tsila Hassine et Carmel Barnea Brezner Jonas ou encore les oiseaux Twitter de l’artiste français encoreunestp enfermés dans des cages et jouant sur la passivité intellectuelle et la crédulité des accros aux réseaux sociaux avec leurs tweets #wtf : “Flash info : une bouteille d’eau vide aurait été retrouvée chez Gérard Depardieu #dryjanuary”, “Emmanuel Macron propose de remplacer la retraite par une cagnotte Leetchi”, “Cinéma : le graphiste oublie le U sur l’affiche du nouveau Superman et crée le scandale à Hollywood”...
Une mécanique bien huilée
Pour véhiculer une infox, rien de plus simple : il suffit de modifier une réalité et de faire croire à une autre. C’est ce que montre Alain Josseau dans l’installation en ouverture de l’expo : une caméra filmant une maquette d’immeuble projeté par incrustation dans une cité bombardée grâce au fameux fond vert 255, ou encore Karl Haendel et son dessin ultra-réaliste dont des morceaux ont simplement été coupés pour distordre sa vérité.
Facile aussi : faire dire ce qu’on veut à n’importe qui en changeant simplement la voix dans une vidéo, comme le prouvent Bill Posters et Daniel Howe dans leur deepfake Big Dada qui bidouille les paroles de Kim K, Trump et Zuckerberg. Les chiffres donnent le tourni : pour sa seconde œuvre, encoreunestp a carrément mis en place un algorithme terrifiant démontrant que chaque seconde circulent sur Internet 5,2 fausses informations pourtant VÉRIFIÉES... Ça fait mal.
Pour aller plus loin...
Sociologue spécialiste des phénomènes de croyance, Gérald Bronner vient de publier son essai passionnant Apocalypse cognitive (PUF) dans lequel il explique l'épidémie de crédulité par l'explosion du temps de cerveau disponible et par une dérégulation du marché de l'information. Instructif et nécessaire.
Jusqu’au 30 janvier 2022 à la l’Espace Fondation EDF, entrée libre ou sur réservation
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